9.10.08

Kippour


Cette année, deux lettres me sont parvenues, deux lettres apparentées d’une étrange manière en de multiples points communs.
Deux lettres d’êtres chers.
Deux lettres écrites dans le secret, inavouables.
Deux lettres qui ne m’étaient pas destinées. Il est toujours singulier de lire une lettre qui ne vous est pas destinée ; habituellement nous le faisons dans le secret, lumière éteinte, entre deux portes, pour ne pas être surpris en flagrant délit de curiosité.
Mais «lettres ouvertes » en quelque sorte : lettres adressées à quelqu’un d’autre, à l’autorité, mais que je devais pourtant lire, car c’est ainsi la tradition.
Deux lettres, qui n’étaient pas écrites par ceux qui pourtant les signaient. Le vocabulaire, le style du nègre commanditaire en était transparent jusqu’à l’outrance, jusqu’à l’invraisemblance.
Deux lettres écrites sous la pression, cette pression affective du chantage aux sentiments.
Deux lettres inutiles. D’une inutilité tellement crasse (formule tellement adéquate, je me demande qui l’a inventée) qu’elles se détournent de leur but, et même se retournent contre leur auteur.
Deux lettres douloureusement reçues, évidemment. Qui laisseront trace, évidemment.

Pourtant, deux lettres différentes.
La première, lettre d’hiver. L’auteur en est adulte, on dit « adulte consentant », ces mots sonnent étrangement ici. Je pense souvent à lui, à comment il doit se sentir. L’acte est impardonnable plus par la vérité défigurée qu’il véhicule que par la trahison qu’elle révèle. J’ai perdu un ami que je croyais fidèle, il me reste le souvenir de beaux moments. Je pense souvent à lui, à comment il doit se sentir. Peut-être pas si mal que cela, et je me serais trompée sur lui. Ceci reste pour moi un mystère.
La deuxième d’été. L’auteur en est enfant. Même exercice de dictée. Même contenu futile, inutile. Même mensonge et manipulation. Je ne me demande pas si cela laissera des traces. Car malheureusement je le sais. Bien sûr, j’ai compris le désarroi, le chagrin, la panique de l’enfant acculé. Je souffre comme s’il était mien. Le destin d’un enfant est terrible à qui l’on demande le choix de Sophie. Quand celui qui le demande est personne ayant autorité sur lui. Le destin d’être mère est terrible : ne pas pouvoir protéger son enfant de ceux qui lui veulent du mal est déjà dur à avaler ; ne pas pouvoir protéger son enfant de ceux qui lui veulent du bien est plus terrible encore.
L’épreuve a été éprouvante, pléonasme. Nous la surmonterons, certitude. Parce que les lettres ne sont que des lettres, que les photocopies sont encore plus éphémères au temps.
Aujourd’hui c’est Kippour, le jour du résultat du grand examen, sondage de la rate et du foie. Ce soir nous serons sous mon talit et une nouvelle année commencera pour nous. En confiance. Ensemble.

2 commentaires:

  1. Anonyme10:37 PM

    Le kippour c'est le pardon?

    Le pardon est parfois difficile...

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  2. Pour Kippour on demande le le pardon de ses fautes, bien sûr. Un point fondamental que peu de gens savent : on peut être se mettre quitte des fautes que l'on a commise envers Dieu; mais pour être quitte des fautes envers quelqu'un, il faut d'abord lui avoir demandé pardon, personnellement et sincèrement par trois fois si besoin. La personne n'est pas obligée de pardonner, si elle ne le veut pas, mais au bout de trois fois, l'on peut considérer être quitte.
    Pou résumer brièvement Kippour est une journée de repentance mais aussi qui permet à chacun de faire le point avec lui-même et de qu'il a fait pendant l'année, pour passer à la suite de l'aventure de la vie.

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