Le lecteur avisé, comme celui qui ne l'est pas d'ailleurs, comprendra qu'il ne doit pas s'attendre à ce que je gaspille ma salive ni ma semence pour lui.
Maintenant que tout est clair, je peux commencer mon histoire. Le lecteur qui se fourvoiera dans le sillon de ce que je m'apprête à creuser ferait bien de revenir en arrière, à ce chapitre précis, afin de s'y reconnaître, remettre les pendules à l'heure et retourner sur la bonne voie. S'il n'a pas envie de rebrousser chemin, il n'a qu'à me laisser tomber et prendre un autre livre, plus facile et plus palpitant. Peut-être même aurait-il intérêt à abandonner sa lecture pour câliner son amie. Et si d'aventure le lecteur était une lectrice, elle peut toujours délaisser mon livre et cajoler son homme.
Une question se pose toutefois : que fera le lecteur dont le lit est vide ? A celà je répondrai par une autre question : son lit est-il vraiment désert ou vide d'amour, comme le mien, même s'il le partage avec quelqu'un ?
Meïr SHALEV, Fontanelle, Prologue p27, ed. Gallimard
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire