Mon rabbin nous a demandé pendant les vacances de printemps d'écrire un texte afin d'expliquer pourquoi nous venons à la synagogue Maayane or de la rue Verdi. Le voici republié puisque le premier semblait avoir des problèmes techniques...
C'est le jour. C'est une boutique donnant sur l'extérieur et on y
pénètre l'air de rien. La pièce est simple, peinte en blanc. Au sol un
grand tapis moelleux où mon chien se love aussitôt. Deux fauteuils
insolites attendent des hotes de marques (?) Des enfants heureux
sortent de tous les coins : une très jeune star de Cannes en rubans de
fée, un petit pollak à casquette, une petite elfe toute frisée qui
vient vous saluer avec un regard pétillant de malice.
C'est midi. C'est une boutique donnant sur l'extérieur et on y pénètre
l'air de rien. Une famille se serre sur l'estrade et une femme lit dans
un grand rouleau avec un doigt d'argent. Dans le public, je reconnais
la jolie dame toute colorée qui signait ses livres hier à la
librairie.
C'est l'heure du thé. C'est le grand salon d'une maison ancienne où le
balcon est envahi de pieds de tomates comme la table l'est de tasses,
de gâteaux et de livres d'études. Sur la table le rabbin se ressert du
thé dans son bol celadon, de sa propre théière en acier émaillé
écaillé. Une assemblée presqu'exclusivement féminine discute,
questionne et pinaille. Des hommes se regroupent parfois pour se donner
l'air. Penelope a laissé dans un coin la Dame à la Licorne inachevée.
Le grand silence concentré est interrompu régulièrement par les cloches
de Vêpres, le rugissement du roi Lion où la survenue de la plus jeune
fée.
C'est le soir. C'est une boutique donnant sur l'extérieur et on y
pénètre l'air de rien. Un homme jeune, à la chaire, coiffé d'une
passoire à plume, lit un texte dans une langue incompréhensible et les
spectateurs armés de crécelles l'interrompent parfois.
C'est la nuit. C'est une boutique donnant sur l'extérieur et on y
pénètre l'air de rien. Des tréteaux encombrés de matsots sont cernés
par des gens enshabattés. Une enfant chante avec sa voix très haut
perchée mais très juste, et le public fait le répons, hommes et femmes
ensemble, et très faux, sauf la dame qui jouait du piano l'autre soir
au concert. Celle qui chantait au théâtre se bouche intérieurement les
oreilles, décontenancée une nouvelle fois de ce manque absolu de pompe
et cernée par une tendresse persistante pour tous ces gens qui sont le
klal.
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