16.2.08

Tania de Montaigne 1 : la langue maternelle

Tokyo c'est loin, de Tania de Montaigne, je l'ai acheté à cause du titre, et puis à cause du résumé de l'histoire qui me rappelait un peu la mienne. J'ai beaucoup aimé au début, mais ensuite, au Japon, l'histoire retombe comme un soufflé. Mais le plaisir de petits extraits reste délicieux, comme celui-ci :
"Je dis personne ne sait qui je suis, et c'est faux. Une personne sait, depuis toujours, avant moi peut-être. Ma mère me sait, avant que je parle, avant les mots, elle me savait déjà. C'est vers elle que je vais, sans réfléchir, avec mon sac sur l'épaule et mon tailleur de dame. Je vais vers la seule qui puisse faire mon mutisme sans trouver ça étrange. Une mère sait faire avec les mots, c'est par là qu'elle a commencé, avec les phrases qu'elle retire de sa bouche pour vous les donner à mâcher, à goûter. Elle vous a donné des mots, des tables, des arbres, des nuages. Votre table n'est pas celle du voisin et pourtant c'est la table de tout le monde, le mystère est là. Elle a donné la becquée un par un , mot par mot, des verbes, des adjectifs, des noms propres, des noms communs, un peu chaque jour. Elle a attendu qu'on les digère, elle a tapoté votre dos. Elle a expliqué l'abstrait et le concret. On n'a pas toujours compris, ona cherché la liberté dans les supermarchés, un pot de liberté, un rouleau. On n'en a pas trouvé et on a été déçu, comme quand on a appris que le père Noël n'existait pas. Elle vous a donné le père Noël, ce gros monsieur immortel qui circule en rennes. En y repensant aujourd'hui, on s'étonne d'avoir pu croire un truc pareil, le type de 200kg qui passe par des trous de cheminées de 50cm de diamètre. Le type habillé en rouge et blanc qui sort de la cheminée sans une tache. Mais à l'époque c'était impossible que ce soit faux puisque c'est elle qui vous le disait, bien sûr que c'était vrai. Et puis un jour elle vous l'a repris le père Noël, elle vous a dit bah oui, te voilà grand, tout ce qui nous entoure doit mourir, moi y compris. ... Ce que je sais : c'est triste quand le père Noël meurt."

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